Nous sommes tombés récemment sur une vidéo du Père Paul-Adrien intitulée « l’homosexualité dans la Bible » tel que le suggérait le titre affiché sous l’image de présentation Youtube. Nous avons eu un moment de crainte, car nous nous sommes dit instantanément deux choses, ou bien le Père Paul-Adrien, dont nous apprécions généralement le contenu de ses vidéos qui enseignent un catholicisme assez traditionnel, va y aller cash ou franco comme on dit familièrement, et il va se mettre toutes les associations LGBT aux sandales et être traîné devant les tribunaux pour crime d’homophobie, comme c’est arrivé à Mgr Aillé récemment, qui disait de façon très nuancée que l’Église ne pouvait pas bénir des couples de même sexe en tant que couple, soit notre frère dominicain va trahir son ordre et faire du jésuitisme, c’est-à-dire aller faire l’anguille afin d’éviter de fâcher qui que ce soit. Entre ces deux craintes laquelle aurait été préférable ?
Dire la vérité sur un comportement proscrit par les Saintes Ecritures qui met des millions d’âmes en péril dans le monde au risque d’être persécuté et même ne plus pouvoir continuer son apostolat sous sa forme actuelle, d’être traîné dans la boue et mis au pilori ou se taite, telle est la question. Car les temps ont changé comme le chantait Bob Dylan, et les mœurs se sont inversés. Elle est loin l’époque où c’était les dominicains qui allumaient des bûchers pour les hérétiques ou les faux-convertis. Maintenant ce sont eux qui se font griller sur les places publiques par les nouveaux inquisiteurs de la nouvelle bien-pensance. Fallait-il plutôt faire comme un théologien que nous avons lu ou entendu et dire que le péché de Sodome n’a finalement rien à voir avec le nom commun issu du nom de la ville ? Il suffisait de dire après tout que le mot « homosexualité » n’apparaît pas dans la Bible, ce qui est vrai, et la question était réglée. Dans l’éventualité de ne pas dire la vérité, le frère est Paul-Adrien est jeune et ne peut pas dire comme Eléazar qui refusa l’hypocrisie et le mensonge pour échapper à la persécution: "A notre âge il ne convient pas de feindre, de peur que nombre de jeunes, persuadés qu'Eléazar aurait embrassé à 90 ans les moeurs des étrangers, ne s'égarent eux aussi, à cause de moi et de ma dissimulation, et cela pour un tout petit reste de vie. J'attirerais ainsi sur ma vieillesse souillure et déshonneur » 2 Macc.6;24.
Qu’a donc choisi notre frère ? Suspens. A notre grande surprise, il n’a choisi aucune des deux solutions. La vidéo ne tient pas les promesses de son titre. L’homosexualité en tant que telle n’est pas abordée. Au mieux on peut dire qu’il a essayé de traiter du sujet, mais soit il revient à la deuxième situation du théologien dont nous parlions et qui ne trouve dans la Bible aucun péché spécifique à Sodome, soit il s’est trompé de titre pour sa vidéo. Celle-ci a des dessins dignes de Walt Disney, la forme est impressionnante. Le frère a mis le paquet, le seul problème est que le fond est vide. Ainsi après un long détour par ChatGPT et l’amour d’amitié Moyen-âgeux liant par une sorte de pacte affectif, spirituel et fraternel deux hommes qui n’a rien à voir avec l’homosexualité ainsi que le dit très justement le frère Paul-Adrien, pas plus que l’amour mystique liant saint François d’Assise et sainte Claire n’avait à voir avec l’amour érotique hétérosexuel. Ceci l’amène sans grande surprise à l’amitié biblique liant le roi David à Jonathan, le premier, à la vue de ses nombreuses conquêtes féminines, comme le souligne Paul-Adrien ne peut pas être soupçonné d’homosexualité. Nous ajouterons que ce n’est pas parce qu’il éprouve pour Jonathan, qu’il appelle son « frère », une « amitié [qui lui] était plus merveilleuse que l'amour des femmes », qu’il parle ici d’amour érotique. Toute l’histoire de David montre au contraire qu’il s’agit là d’un amour fraternel fort, celui qui fait qu’on donne sa vie pour ses amis. Plus fort encore sera l’amour de David pour son Dieu : « Meilleur que la vie, ton amour », écrit-il au Psaume 63. David classe qu’on l’amour par ordre croissant : eros, philae, agapé, l’amour charnel, d’amitié et divin. Le frère Paul-Adrien réussit donc le tour de force de faire une vidéo sur l’homosexualité dans la Bible sans parler une seule fois de l’homosexualité dans la Bible. Nous n’osons pas imaginer qu’il n’a trouvé aucun passage à ce sujet. Nous préférons penser qu’il n’a pas voulu dire ce que la Bible pense des plaisirs des habitants de Sodome. Bref, nous sommes restés un peu sur notre faim car le titre était trompeur, mais cela nous a rassuré pour le frère Paul-Adrien qui n’a pas été assez téméraire pour se mettre à dos les torquemadas des dogmes nouveaux.
Avant que ceux-ci n’arrivent à faire suffisamment d’autodafés pour faire disparaître ce que dit la Bible, non pas de l’homosexualité, qui est plus un pli psychologique, un attrait vers la personne du même sexe, mais de l’union charnelle de deux hommes. Puisque la vidéo du frère Paul-Adrien ne l’a pas fait et a pu laisser d’autres auditeurs gros-jean-comme-devant, il faut relire ce que la Bible du sujet dans le livre de l’Exode 13,10, dans le Lévitique 18,22, dans la lettre de saint Paul au Corinthiens (6,9), où la Bible de Jérusalem traduit d’ailleurs étrangement le grec arsenokoites et le latin masculorum concubitores par "mœurs infâmes" au lieu de "coït entre hommes", ce qui fait qu’on ne comprend pas bien de quoi parle l’Apôtre des Gentils. Finalement on peut lire la 2ème lettre de Pierre (2,6-10). On comprend d’ailleurs qu’il a évité l’obstacle car les Saintes Ecritures n’y vont pas de main morte. C’est tout à fait politiquement incorrect. Mais Pierre et Paul ont fait de la prison pour moins que cela. Seraient-ils encore en vie, ils se laisseraient traîner à nouveau devant les tribunaux sans hésitation.