A l’attention du Père Bandelier pour la rubrique « Une Foi, mille questions »
Mon Père,
Je suis triplement touché par votre réponse. Premièrement parce que, comme me l’avait dit mon ami, vous n’hésitez pas à prendre sur votre temps pour répondre. Deuxièmement pour la promptitude avec laquelle votre réponse est arrivée. Troisièmement pour la concision et le ton fraternel de cette dernière. Je ne pouvais donc pas ne pas vous remercier pour ceci. En lisant votre message je ne peux qu’être d’accord avec vous, mais rien de ce que vous dites ne faisait partie de mon interrogation initiale.
Les différentes sciences du Verbe en son humanité coexistent en effet comme vous le soulignez, et c’est même cette multiplicité de connaissances dans la seule personne de Jésus qui me faisait douter de son ignorance concernant la femme hémorroïsse. C’est à propos de cette connaissance là, à la lecture de Saint Thomas d’Aquin, que je ne crois pas qu’on puisse dire que le Christ ait découvert l’identité de la « coupable » par son seul aveu. C’est là le seul point qui me chiffonnait dans votre article.
Je suis sinon tout à fait d’accord avec vous sur « la connaissance expérimentale » du Christ, fruit de son âme créée. C’est ce que je vous ai écrit la dernière fois en citant le Catéchisme et La Somme Théologique. Sur ce point précis l’âme du Christ apprend « comme tout le monde » ainsi que vous le dite, en précisant que c’est ambigu, avec raison, car si on oublie les autres modes de connaissance de ce même Christ, on retombe dans l’erreur qui consiste à réduire le Christ à un simple « super » homme.
Par rapport au métier de charpentier, le Christ n’a pas fait semblant de l’apprendre de façon pratique et expérimentale, en développant comme le dit Saint Thomas « un habitus de science ». Il a donc pu progresser dans cette discipline par sa science acquise. Par contre pour ce qui est de l’enseignement « formel » de l’art du charpentier, il ne me semble pas possible, lorsqu’on est à l’écoute de Saint Thomas,(ce qui n’est pas une obligation pour adhérer au Christ, mais qui peut y contribuer) d’affirmer que Joseph ait appris quelque chose au Christ en considération de sa science infuse, par laquelle « le Christ a connu toutes choses », dixit le même Frère Thomas.
Pour ce qui concerne les hérétiques cités dans mon message précédent, je me suis contenté de les puiser dans La Somme Contre les Gentils, mais je vous concède que Saint Thomas, bien qu’il fût un grand théologien, ait pu errer en matière d’histoire. Je sais que beaucoup de penseurs et même d’hommes d’Eglise éprouvent un certain mépris pour la pensée du Docteur commun de leur propre Eglise (je ne pense pas à vous). Pourtant, bizarrement, cette défiance actuelle va de pair avec des dérapages théologiques parfois très graves. J’arrête de vous embêter et je vous assure de ma lecture fidèle de vos articles.