Sagesse chrétienne
Le site de la doctrine catholique authentique

A la question « qu'est-ce que l'après-Concile ? », M.Etienne Gilson répondait de mémoire :  c'est un temps où les laïcs ne savent pas ce que pensent leurs prêtres. A la question : « qu'est-ce que l'avant synode de la synodalité ? », on pourrait maintenant répondre : c'est un temps où les prêtres ne savent plus ce qu'ils pensent eux-mêmes.  Si l'on doit juger un arbre par ses fruits, il suffit de juger l'Eglise que l'on nous prépare avec la révolution permanente de la synodalité à travers le prêche d'un prêtre qui adhère à ce projet inquiétant. Voici ce que cela donne. 


 Disons pour commencer que rien n'est mauvais en soi ici-bas et que le mal ne se nourrit que du bien. Le sermon d'un prêtre pro-synodalité est donc comme un champ où se mèlent le bon grain et l'ivraie pour reprendre la parabole du Christ transmise par Saint Matthieu. L'ivraie représente les sujets du mauvais, c'est-à-dire ici les erreurs doctrinales, spirituelles, théologiques et dogmatiques qui détournent le fidèle de la vérité de la foi et des mœurs et qui perdent les âmes. Ce sont les « scandales » qui, selon le sens du mot plus moderne, choquent les auditeurs, mais aussi selon le sens plus profond, qui les font chuter, c'est-à-dire qui les amènent à la faute. Car un mauvais sermon sème le doute, la confusion et la fausseté.  Tout est mélangé et tout est ambigu, à tel point qu'on ne sait plus où est le bon grain et où est l'ivraie. Un prêtre de la synodalité pratique un jésuitisme qui risque d'endormir une oreille inavertie qui ne remarquera pas l'énormité de certaines assertions. 

Pour commencer, nous donnerons en exemple l'intention de prière, louable en soi, pour les victimes du tremblement de terre du Maroc. Quand un prêtre catholique, en pleine prière eucharistique, prie pour que des défunts musulmans « aillent au paradis d'Allah », on ne sait pas trop ce qu'il entend par là. Soit il veut traduire le mot Allah par Dieu, comme le font les chrétiens de langue Arabe, et ils souhaitent que ceux qui meurent sans avoir connu le Christ puissent malgré tout accéder à l'unique et vraie Béatitude, en se basant sur ce qu'ils ont vécu selon leur bonne conscience, sans faute de leur part de ne pas avoir découvert la seule voie du salut pour un chrétien, offerte par le sacrifice de Jésus. Soit il laisse entendre que le paradis de l'islam existe parallèlement à celui du christianisme, ou pire qu'il est le vrai paradis. Mais les deux paradis s'opposent et ne sont pas compatibles, ni vrais en même temps et sous le même rapport. Ils sont contradictoires. Le premier promet un bonheur tout terrestre et charnel, où les justes  vont se repaître  des plaisirs de la table et de la luxure. Le paradis chrétien, à l'inverse, promet une joie toute spirituelle, où Dieu lui-même sera l'objet de la félicité par la vision directe de son essence. Les justes seront comme des anges, avec des corps transfigurés, où il n'y aura plus de mariage, ni de repas. Le festin des viandes grasses et des vins capiteux des Saintes Ecritures n'est qu'une image. Entre ces deux paradis, il faut choisir et la prière de notre clerc de la synodalité ne le permet pas. On reste dans le flou.  

Dans son sermon, il part plusieurs fois de l'étymologie des mots, ce qui est encore une bonne chose, mais l'utilisation qu'il en fait, l'égare, et les fidèles avec lui, au lieu de l'orienter. 
 Par exemple il est victime lui-même de l'étymologie du mot « péché » qu'il propose puisqu'il « manque sa cible ». Il distingue à juste titre l'étymologie grecque du sens chrétien du péché c'est-à-dire un mal moral, mais en ajoutant que le second n'est pas le principal. Car le péché grec, amartéma, est en effet une action qui rate sa cible, donc une mauvaise action ou une erreur, cela reste au niveau purement humain. En régime chrétien, le péché va bien au-delà, c'est une offense commise envers Dieu, et c'est le sens le plus important.On retrouve bien dans le péché chrétien la déviation de la racine grecque, mais on va beaucoup plus loin à partir de cette racine, car dans le péché « l'acte s'écarte de la règle de la raison ou de la loi divine, qui est requise ». De là vient que le péché selon saint Thomas d'Aquin est un « acte difforme » (De Malo, Q.2, a.1). Il ne fallait donc pas dissocier l'étymologie grecque du sens chrétien du mot « péché », mais plutôt  partir de la racine pour expliquer ce qu'est le péché pour un catholique, pas seulement une erreur de visée purement humaine, mais bien un mal dit de « faute » qui provient d'un défaut de bien, d'une soustraction de la volonté libre de l'homme « au plan de l'intellect divin ». C'est l'opposé de l'acte vertueux qui est une « soumission aux dispositions de l'intelligence divine » (Somme Théologique., I, 17, rép.)  Non seulement nous n'avons pas cette explication mais, il y a une inversion des rapports et des valeurs. Le sens premier est écarté au deuxième plan pour obtenir une morale toute humaine qui peut être offerte au grand public, chrétien ou non. Cela passe mieux et fâche moins. 

 On monte d'un niveau lorsque notre clerc aborde le thème de l'arbre du bien et du mal. Le texte de l'Evangile du dimanche est celui de la correction fraternelle : « Si ton frère vient à pécher, va le trouver et reprend le seul à seul. » Ce passage devient un prétexte, d'après notre clerc, pour enseigner que ceux qui se permettent de juger du bien et du mal commis par le prochain reproduisent le péché d'Adam et Eve au jardin d'Eden. C'est un peu dur à avaler. Si l'on suit notre prêcheur sur cette voie, il faut admettre que juger de la bonté ou de la malice d'un acte revient à goûter au fruit défendu  par Dieu à l'aube de l'humanité. C'est une accusation très grave car elle remet en question toute la moralité de l'acte humain. Cela, nous semble-t-il, relève d'une grave confusion sur la notion de l'arbre de la connaissance du bien et du mal. Notre prêtre pense sans doute que l'arbre donne la connaissance du bien et du mal à celui qui mange de ses fruits. Cela signifierait qu'Adam était privé de science et de discernement pour poser des actes bons et pour éviter le mal. C'est ignorer qu'Adam, en tant que premier homme, bénéficiait d'aides supplémentaires, des connaissances données par Dieu pour le guider dans sa vie de premier de cordée. 
De plus, dans son état d'innocence, son intelligence et sa volonté n'avaient pas été encore fragilisées par le péché de la chute originelle. Adam était ainsi bien placé pour savoir ce qui était le bien à faire et le mal à éviter. L'arbre de la connaissance  du bien et du mal n'était pas un puit de science dans lequel il suffisait de s'abreuver pour savoir quelle était la volonté de Dieu, mais plutôt c'était comme un symbole, à travers un arbre vraisemblablement réel, de la volonté de Dieu. L'arbre était planté au milieu du jardin comme le libre arbitre est planté au milieu de l'âme humaine.  Il représente l'épreuve du libre arbitre, le lieu de la décision intime où je me décide pour ou contre la volonté de Dieu dans ma vie. C'est pour cela que saint Thomas écrit que « l'arbre de la science du bien et du mal était un arbre matériel, ainsi dénommé à cause de l'événement futur, puisqu'après en avoir mangé, l'homme apprit par l'expérience du châtiment quelle distance il y a entre le bien de l'obéissance et le mal de la désobéissance. Et néanmoins il pouvait symboliser le libre arbitre, comme disent certains. » (I, 102, 1, sol.4) L'homme n'a pas appris ce qu'il fallait faire en mangeant le fameux fruit qui n'était pas forcément une pomme, la confusion vient du latin malum qui signifie à la fois la pomme et le mal, il a donc goûté au fruit amer du péché qui consiste à désobéir à Dieu. On retrouve ici le débat de tout à l'heure sur le péché comme étant une soustraction à la volonté divine.  
Heureusement, il est possible de discerner le bien et le mal pour soi ou pour autrui, sans commettre la faute originelle. C'est d'ailleurs tout le sens de l'Evangile du jour. Le Seigneur ne dit pas de ne pas discerner la faute de la vertu, et de se taire si le prochain se trompe et commet le mal, mais au contraire, non seulement il veut qu'on sache quand il y a une faute et en plus il veut qu'on aille en avertir le prochain. Ne pas le faire est pour un saint Thomas un péché supplémentaire : «  montre-lui brièvement [sa faute]. S’il [la] reconnaît, tu dois alors [la lui] remettre. C’est pourquoi [il est dit] : Instruisez-les dans un esprit de douceur, Ga 6,1. Mais est-ce que celui qui néglige de corriger pèche ? Augustin [écrit] : «Si tu ne [le] corriges pas, tu deviens pire par ton silence que lui en péchant.»  Le sens de l'Evangile est par conséquent complètement inversé et faussé. Nous sommes en plein dans l'ivraie. 

 Comme si tout cela ne suffisait pas, un prêtre pro-synodalité termine son sermon en disant que pour suivre les intentions du pape François qui désire tant partager ce synode avec l'Eglise, il faut tel un saint Jean-Baptiste que le pasteur diminue pour que les brebis croissent.  Tout l'enjeu est là : écarter les ministres, diminuer leur pouvoir pour que les fidèles s'investissent au point de prendre leur place. En effet la grande peur du pape est le cléricalisme, entendons par là la tyrannie des prêtres envers les fidèles. Ces prêtres despotiques qui effraient tant le Saint Père, qui persécutent leurs ouailles, qui transforment les confessionaux en « salles de tortures » nous n'en avons personnellement jamais rencontrés. Nous avons par contre vu beaucoup de ministres mous, sans saveur, démotivés, laxistes, sans science de la Foi, débordés par des paroissiens en quête de pouvoir et de reconnaissance, déléguant leurs prérogatives, désertant leur poste de tête de la paroisse. Notons en passant que notre bon Père admet lui-même que l'appelation « synode de la synodalité » est un peu bizarre en soi, ce qui est peu surprenant puisque le mot « synodalité » n'a jamais été utilisé depuis la fondation de l'Eglise. C'est donc un néologisme inutile. Notre prêcheur a eu moins le mérite de savoir ce que signifie vraiment le cléricalisme contrairement à François: c'est quand le clergé s'immisce dans les affaires des politiciens. C'est cela que visait Gambetta avec son célèbre « le cléricalisme, voilà l'ennemi ». Il se moquait pas mal de savoir si les prêtres dirigeaient de façon autoritaire leurs paroisses. Quand le pape sculpabilise les chefs d'Etat au sujet de l'immigration, de l'écologie et du  vaccin pour tous comme sommet de la charité, n'est-pas là pratiquer le vrai cléricalisme ? Quoi qu'il en soit, cela n'excuse pas notre clerc lorqu'il dit une chose aussi absurde que : « je suis un laïc anticlérical ». Il ne veut pas faire de la politique, c'est normal, les prêtres n'ont pas le droit de le faire. Donc aucun danger normalement de ce côté-là. 
Par contre se proclamer laïc quand on est prêtre, c'est une bêtise, c'est ne rien dire, ou pire c'est se contredire. Le laïc est justement celui qui n'est pas clerc ou prêtre. Un prêtre qui dit en chaire qu'il n'est pas prêtre, soit délire, soit admet qu'il est un faux prêtre, un loup déguisé en pasteur. Dans les deux cas de figure c'est inquiétant.  Il se veut « laïc anticlérical » car selon le vœux de la synodalité, les paroissiens, selon ses mots, sont les « vrais responsables » de la paroisse puisqu'ils « répondent » de leurs actes  auprès du prêtre. Certes ils rendent des comptes de leurs actes en confession par exemple, mais cela ne les rend pas chef de la paroisse à la place du curé. Etre responsable de ses actes ne  signifie pas être le responsable des actes d'autrui. C'est un peu jouer sur les mots mais cela montre une vraie tendance à vouloir donner le pouvoir aux fidèles. Celui qui a selon le sens du mot la charge de prendre soin des âmes qui lui sont confiées, et qui ne fait que prolonger le triple pouvoir de l'évêque c'est le curé : pouvoir doctrinal, d'enseignement, sacerdotal pour administer les sacrements, pastoral ou de gouvernement pour obliger les fidèles à faire ce qui est bon pour leur salut.   

N'oublions pas que le synode entend donner le pouvoir de vote à des laïcs au même titre qu'aux évêques. C'est une trahison complète du Motu Proprio de saint Paul VI Apostolica Sollicitudo de 1965 sur ce que doit être le synode des évêques. Si le texte dit que le synode, dans son essence est « un conseil permanent d'évêques », « qui comme toutes les institution humaines, pourra être perfectionné par la suite », il ne dit pas qu'on pourra bouleverser les règles générales qui le régissent.  
 Le présent  danger n'est pas le cléricalisme mais bien le laïcisme, né de l'obsession de la démocratisation à tout va. Rappelons que les mots clés dy synode au niveau continental américain, avant de passer au niveau universel, sont inclusivity et welcoming. C'est-à-dire l'ouverture de l'Eglise à tous. Nous croyions que l'Eglise catholique était déjà universelle. Cela signifie donc quelque chose d'autre et de nouveau. Il ne s'agit pas d'accueillir tout le monde mais bien d'accepter les nouvelles mœurs à la mode. L'Eglise s'apprête à accepter et à bénir tous les actes qui jusqu'à maintenant étaient considérés comme des déviances et des péchés. Comme du temps des jésuites de Pascal dans ses Provinciales, puisqu'on veut faire rentrer tout le monde dans l'Eglise, et comme presque plus de catholiques ne veulent connaître ni vivre l'enseignement du Christ, il faut baisser la barre, et non plus adapter les mœurs à la volonté de Dieu mais inversement adapter la volonté de Dieu aux mœurs actuels. Tout cela nous annonce ce qu'est cette Eglise de la synodalité qu'on essaye de nous vendre. : une inversion totale des valeurs et des rôles, de la morale, de la doctrine et de la structure que le Christ a lui même établie.

Copyright

>>Admin